AUTRICHE : Innsbruck, des cloches et un héros national !

Parmi les nombreux domaines skiables entourant Innsbruck, Kuhtai qui offre des pistes ouvertes jusqu’au printemps

Innsbruck, « Capitale des Alpes » comme elle aime à se surnommer elle-même, est située à 575 mètres d’altitude dans la vallée de l’Inn (Innsbruck signifie littéralement « le pont sur l’Inn ») et au niveau de l’embouchure de la rivière Sill. La ville a, de tout temps, été un point de passage obligé dans la traversée des Alpes. La cité, vieille de 800 ans, est encadrée au Nord par le massif calcaire de la Norkette (2.334 m) avec sa terrasse de la « Huneburg » et au Sud par le Patschkofel (2.247 m) et les collines Mittelgebirge. C’est après Vienne la seconde ville de Congrès des Alpes. Renommée à travers le monde, Innsbruck a déjà reçu deux fois les Jeux Olympiques d’Hiver en1964 et 1976.
CLOCHE
Elizabeth Grassmayr, aussi guide touristique !

Nous avons déjà fait d’autres reportages sur Innsbruck  auxquels nous vous renvoyons (Lien : Innsbruck et ses villages). Aujourd’hui, nous avons pu assiter à un événement d’importance (qui se déroule seulement une fois par mois) : le coulage de 7 cloches à la fonderie Grassmayr – qui a pignon sur rue depuis 1599 – destinées à des églises de Salzbourg, de Bavière et une autre de Roumanie (Inand). Autre temps fort en 2009 : Le Tyrol, et surtout Innsbruck, commémore les 200 ans de la bataille contre Napoléon 1er menée par le charismatique héros tyrolien, Andréas Hofer… Récit

Les Grassmayr, une dynastie de fondeurs de cloches depuis 15 générations !
CLOCHE
Les petits enfants (10 en tout !) d’Elizabeth et Christopher
constituent la 15ème génération de Grassmayr !
En 1599, Bartlme Grassmayr coula sa première cloche au Tyrol. Les connaissances techniques des fondeurs de cloches Grassmayr et les secrets de construction de leurs cloches (« ossatures ») sont jalousement gardés depuis 4 siècles, continuellement élargis par des recherches et transmis de père en fils selon une tradition se perpétuant depuis 15 générations. Dans une centaine de pays du monde entier retentissent les cloches issues de la fonderie de cloches Grassmayr. Aussi bien à la gloire de Dieu (« Soli deo Gloria » est le slogan de la maison, soit « Tout dépend de la bénédiction de Dieu ») que pour le bonheur des hommes. La fonderie de cloches Grassmayr ne se contente pas de couler de nouvelles cloches mais s’est aussi spécialisée dans la restauration de cloches historiques et dans la fabrication de la gamme complète d’accessoires techniques pour installations de cloches.
 Création d’une cloche en direct de la fonderie…

 L’expérience ancestrale, associée aux techniques modernes, permet un calcul précis du moule d’une cloche. L’épaisseur des parois de la future cloche – le tracé – est dessinée sur un moule modèle. Au-dessus de ce moule est placé un moule creux en argile. Etant donné que la pression du métal pourrait détruire le moule de la cloche, celui-ci est enterré dans la fosse de la fonderie. Des canaux de brique forment les conduits menant de l’ouverture du four aux moules individuels. Le moule est chauffé pendant 14 heures environ, avec du bois de sapin sec, à une température de 1.150°C.

CLOCHE
Au moment de la coulée, une prière, un silence… Le nom du Tout-puissant est invoqué… Il ne faut pas oublier que les cloches sont des instruments lithurgiques et que les commanditaires sont des religieux ! Parmi les personnes présentes à la cérémonie, les prêtres ayant commandé les cloches pour leur paroisse participent solennellement à la manifestation et les fidèles les accompagnent dans cette bénédiction où des chants d’église sont entonnés par tous.
CURES

Le four est chauffé avec une lance et le bronze liquide (22% d’étain et 78% de cuivre) versé en un flot ardent dans le conduit. Il se répand dans les bassins de coulée des moules de la cloche. Le bouillonnement de métal qui suivra indiquera que le moule de coulée est plein et que la cloche est « terminée ». S’ensuivra alors la fin de la cérémonie avec un pot rituel offert par la maison Grassmayr à tous les paroissiens : Schnaps et petits fours maison dans la cour du musée !

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Elizabeth Grassmayr, propriétaire des lieux et par ailleurs guide touristique au Français impeccable, nous expliquera ensuite que quatre jours après la coulée, les cloches refroidies sont déterrées et débarrassées de leur moule en argile. Les coutures de la coulée sont alors gravées au marteau et au burin et la cloche est nettoyée. De l’eau et du sable lui donneront son poli final.

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« Les cloches en provenance de nos ateliers sont des « instruments de musique », dit Elizabeth, qui par la complexité de leur structure permettent l’émission de plusieurs tons (une cinquantaine dans le cas des grandes cloches). Ce qui fait la qualité des cloches Grassmayr ce ne sont pas seulement les demi-tons accordés un à un mais la résonance prolongée (durée d’évanouissement du son). Le musée des cloches est une combinaison tout à fait originale de fonderie de cloches, de musée des cloches et de salle de résonance. La longue expérience dont nous bénéficions est pour nous l’assurance que vous ne manquerez pas vous-aussi d’être fascinés par la visite ». En plus, la boutique du musée vous permettra de ramener de petits souvenirs carillonnants ! Internet : grassmayer.at

Andreas Hofer, le patriote Tyrolien qui défia Napoléon 1er

HOFEREn 2009, le Tyrol célèbre le 200ème anniversaire de la révolte tyrolienne de 1809 au cours de laquelle l’armée locale resta invaincue dans trois batailles menées contre la France et la Bavière. Andreas Hofer demeure le symbole de cette guerre d’indépendance.

Andreas Hofer naquit en 1767 à St. Leonhard in Passeier (en italien : San Leonardo in Passiria, dans le Tyrol du Sud. Son père était aubergiste au Sandwirt et le jeune Andreas y apprit son métier. En 1791, il fut élu au Landtag tyrolien. Au cours de l’annexion du Tyrol par la Bavière, au Traité de Presbourg en 1805, Hofer prit la tête du mouvement de résistance anti-bavaroise. En effet, ce traité imposait à l’Autriche de céder le Tyrol à la Bavière, ce qui représentait pour les Tyroliens des bouleversements implacables : la soumission de l’Église face à l’État, l’introduction de nouveaux impôts, l’organisation de nouvelles unités territoriales, mais surtout la suppression de certaines libertés et de certains privilèges.

HOFEREn janvier 1809, il était à Vienne, lorsque l’empereur François II d’Autriche, offrit son support moral à une possible insurrection. Dès le 9 avril 1809 la rébellion tyrolienne débuta. Le 11, ses troupes défirent les Bavarois à Sterzing. Cette victoire mena à l’occupation d’Innsbruck. Hofer acquit la notoriété en devenant chef charismatique du patriotisme tyrolien et symbole de la résistance à Napoléon 1er !

Les 25 et 29 mai 1809, les troupes d’Hofer vainquirent les Bavarois au Bergisel (le terrain des batailles était situé à l’emplacement du fameux tremplin olympique actuel). Hofer prit Innsbruck le 30. Il reçut alors de l’empereur d’Autriche une lettre lui assurant qu’il ne signerait jamais de traité exigeant la cession du Tyrol. La victoire de Wagram, le 6 juillet, vint annuler les succès précédents. L’armistice de Znaim, le 12, cédait le Tyrol et la Bavière. Napoléon envoyait 40 000 hommes pour reprendre Innsbruck… La guérilla de Hofer recommença. Sa tête fut mise à prix. Les 13 et 14 août, il défit le maréchal Lefebvre au Bergisel après 12 heures de bataille au cours de laquelle les Tyroliens vinrent à bout des troupes françaises, bavaroises et saxonnes. Le peintre Michael Zeno Diemer fixa des scènes de cette bataille dans son panorama de 1896 montré au public, jusqu’à il y a quelques années, dans une rotonde située à Innsbruck. Actuellement, un musée est en phase de construction sur le Bergisel. Il est, entre autres, consacré à la rébellion tyrolienne de 1809 et doit offrir un nouveau toit à cette fresque gigantesque.

HOFERIl devint commandant en chef et dirigea ses troupes depuis Hofburg au nom de l’empereur d’Autriche. D’après les récits de l’époque, la stratégie de Hofer était simple : « se lancer sur les Bavarois et, dès lors qu’on les a, les jeter de la montagne ». Le 29 septembre il reçut une médaille impériale et une nouvelle assurance du soutien de l’Autriche au Tyrol. Mais le Traité de Schönbrunn reconduisait le scénario de l’armistice de Znaim et cédait encore le Tyrol à la Bavière. Hofer et ses compagnons déposèrent alors les armes contre la promesse d’une amnistie.

Le 12 novembre, Hofer reçut de fausses informations de victoires autrichiennes : il repris les armes. Cette fois, la mobilisation fut faible et rapidement les troupes franco-bavaroises anéantirent la guérilla. Hofer alla se cacher dans les montagnes de son Passeiertal natal. Sa tête fut mise à prix 1 500 florins. Franz Raffl, son voisin, le trahit et il fut capturé par les troupes italiennes le 2 janvier 1810 dans un chalet d’alpage (le Pfandleralm, un pâturage alpin près de la ferme de Prantach en face de San Martino in Passiria) puis envoyé à la cour martiale de Mantoue. Raffl fut retrouvé lynché.

La légende prétend que Napoléon donna l’ordre d’un « juste procès avant de l’éxécuter» (plus tard il confia à Metternich que Hofer avait été exécuté contre sa décision). Andreas Hofer fut fusillé à Mantoue le 20 février 1810. Il devint ainsi martyr en Allemagne et Autriche. Son nom servit de point de ralliement contre le pouvoir de Napoléon.

En 1823, les restes de Hofer furent rapatriés de Mantoue à Innsbruck. En 1834, sa tombe, ornée d’un mausolée de marbre, est érigée dans la cathédrale Saint-Jacques « Hofkirche ». En 1818, sa famille reçoit une lettre de noblesse de l’empereur d’Autriche. En 1893, sa statue en bronze est érigée au Bergisel. Son hymne est devenu l’hymne officiel du Tyrol. Pendant les années de querelle linguistique au Tyrol du Sud, la mémoire de Hofer fut souvent utilisée comme exemple de la résistance de la population germanophone aux velléités d’italianisation, notamment sous le régime fasciste.

Les traces du passage du patriote à Innsbruck

L’entrée d’Andreas Hofer dans Innsbruck le 15 août 1809 est ancrée dans une inscription sur la façade de l’hôtel « Goldener Adler » dans la vieille ville où le commandant en chef installa tout d’abord ses quartiers. Quelques jours plus tard, Hofer transféra ses proches et ses secrétaires dans le Hofburg, le Palais impérial, d’où il se chargea de l’administration du pays « au nom de l’Empereur ». La pièce qu’il utilisa alors pour gouverner n’est pas accessible au public. En revanche, une salle a été baptisée à son nom.

BATAILLEAndreas Hofer dirigea la destinée du Tyrol jusqu’au mois d’octobre à partir d’Innsbruck. Le traité de paix signé entre l’Autriche et la France le 14 octobre 1809 mis fin à la révolte tyrolienne : il ne faut pas oublier que Napoléon 1er allait épouser Marie Louise d’Autriche le 11 Mars 1810 ! Après la nouvelle avancée des troupes bavaroises le 25 octobre 1809 jusqu’à Innsbruck, les Tyroliens succombèrent le 1er novembre 1809 au cours de la 4ème et dernière bataille du Bergisel. Le traité de paix signé entre l’Autriche et la France en 1814 à Paris réintègre le Tyrol à l’Empire des Habsbourg.

Il existe de nombreux endroits dans Innsbruck qui permettent de suivre les traces d’Andreas Hofer et de la rébellion tyrolienne de 1809 : la statue de Hofer sur le Bergisel, un boulet de canon près de la maison Gumpp dans la vieille ville (carrefour ruelles Kiebachgasse- Schlossergasse), un monument intitulé « anno 9 », une série de tableaux consacrés aux protagonistes et aux événements de l’année 1809, le somptueux tombeau dans l’église impériale d’Innsbruck (Hofkirche) abritant les ossements d’Andreas Hofer depuis 1823 sont autant de preuves que ce dernier ainsi que ses compagnons de combat furent, peu de temps après leur mort déjà, vénérés comme des héros de l’indépendance. À l’occasion du bicentenaire, des expositions, des représentations théâtrales, des discussions et de nombreuses autres manifestations proposent de porter un regard souvent critique sur la rébellion tyrolienne et la personne d’Andreas Hofer.

Circuits guidés : Elisabeth Grassmayr, guide certifiée, propose également de suivre ces traces riches en histoire qui devient vivante sur le Bergisel. Où siégeait l’ennemi ? Où se tenaient les troupes tyroliennes ? Quelle fut la réaction de l’Empereur d’Autriche ? Venez découvrir des témoins secrets de l’année 1809 : boulets de canon, tableaux votifs, plaques commémoratives… S’ensuit la visite des tombeaux dans la Hofkirche, l’église impériale d’Innsbruck, et de la vieille ville où de nombreux autres témoins vous attendent. Internet : innsbruck.info