Au fil de l’eau en Islande
L’Islande ? Il y a longtemps que cette île d’Europe du Nord, perdue entre la Norvège et le Groenland, nous attirait. Prendre des avions, continuer en voiture de location à sa découverte ? Nous avons choisi de l’explorer au fil de l’eau à l’occasion d’une croisière au départ du Havre ! Ce « slow tourisme » a l’avantage de déplacer les voyageurs sans que ceux-ci aient à s’occuper de la logistique… Et puis, découvrir chaque jour un nouveau décor, un nouveau fjord, une île, une capitale… a quelque chose de fascinant ! Embarquement immédiat pour le « Pays des Glaces » puisque telle est la traduction littérale du mot « Islande » !
L’Islande – distante d’une cinquantaine de kilomètres du Cercle Polaire Arctique – est située sur la dorsale médio-atlantique séparant les plaques tectoniques eurasienne et nord-américaine d’où son intense activité volcanique. Géographiquement à cheval sur le rift de séparation des deux continents la plus grande partie de son territoire est cependant du côté européen. Son climat demeure océanique, tempéré, malgré les latitudes car l’influence polaire est limitée par le Gulf Strream. Ses plus proches voisins sont le Groenland situé à 287 km au nord-ouest, et les îles Féroé à 420 km au sud-est où nous ferons escale.
Pour parler de l’intense activité volcanique, tout le monde se souvient du fameux volcan Eyjafjallajökull qui par son éruption inattendue sema la panique dans le monde entier en 2010 figeant toute circulation aérienne… Mais aussi le mal qu’avaient les commentateurs à prononcer son nom ! Il faut dire que tous les mots islandais sont vraiment rebelles aux francophones comme aux anglophones…
L’Islande culmine à 2109 mètres au Hvannadalshnjukur (Oui, je sais : tout aussi imprononçable que le nom du volcan et trop difficile à écrire !). Le centre de l’île renferme les « Hautes Terres désertiques » et les côtes sont découpées par les fameux fjords. Plus de 10 % de l’île est constitué de glaciers et plus de la moitié du territoire est dépourvu de végétation.
Le paradis des oiseaux marins…
L’Islande héberge de grandes populations d’oiseaux, en particulier marins. La falaise de Latrabjarg , par exemple, est considérée comme la plus grande falaise à oiseaux de l’Atlantique nord, où se trouve la plus grande colonie de petits pingouins (Alca torda) au monde. Après avoir failli disparaître voici un siècle, prélevés avec excès pour être consommés, tout comme leurs œufs, les macareux moines, parents des pingouins et emblème de l’Islande, sont aujourd’hui plusieurs millions, en grande partie dans les îles Vestmann où ils constituent la plus grande colonie de macareux moines au monde. On trouve aussi plusieurs espèces d’oiseaux d’eau douce dans l’aire de conservation de Myvatn-Laxa. Evidemment, la navigation n’est pas la meilleure solution pour s’approcher des volatiles… faudra revenir !
Runavik, aux îles Féroé
Après deux jours entiers de navigation, nous atteignons l’archipel des îles Feroë où nous faisons escale à Runavik. C’est l’un des trois pays constitutifs du royaume du Danemark, avec le Danemark lui-même et le Groenland convoité par Donald Trump… La terre la plus proche est l’île écossaise de North Rona à 256 km au sud. La côte d’Ecosse est située à 322 km au sud-sud-est. L’Islande à 431 km au nord-ouest et sa capitale, Reykjavik à 762 km. Le Danemark est distant de 989 km au sud-est et sa capitale, Copenhague de 1283 km. La Norvège , avec la ville de Bergen est distante de 656 km à l’est… des îles vraiment perdues en plein océan !
Les Îles Féroé sont une province autonome du Royaume de Danemark depuis 1948. Elles possèdent un gouvernement qui leur est propre et qui a compétence dans toutes les affaires, à l’exception de la défense. L’archipel constitue une écorégion terrestre dans la classification du Fonds Mondial pour la Nature sous le nom de « Prairies boréales des îles Féroé ». Runavík est un important port de pêche situé au sud de l’île d’Eysturoye. Une jolie promenade conduit à un lac naturel très photogénique qui nous réservera quelques timides rayons de soleil !
Seydisfjordur, le plus beau fjord de la côte Est d’Islande
Nous voici enfin en Islande au 4ème jour de navigation ! Seydisfjordur est un authentique petit port de pêche situé au fond d’un des plus beaux et plus longs fjords de l’est de l’Islande. Celui-ci s’étend sur 17 kilomètres et offre un cadre absolument exceptionnel. Il est l’un des joyaux de la côte Est. Il s’entoure de montagnes d’où jaillissent d’innombrables chutes d’eau. Le port est relié aux îles Féroé par un navire côtier transportant de nombreux touristes à la belle saison. Les premières installations humaines dans la zone du village datent de 1848. Il fut fondé par des pêcheurs norvégiens. Seydisfjordur fut aussi une base pour les forces américaines et britanniques durant la Seconde Guerre Mondiale.
On y pêche surtout le hareng et les allers-retours de chalutiers sont fréquents dans le fjord. Seydisfjordur est aussi connue pour être une ville d’art et pas uniquement pour la musique. En effet, après Reykjavik, il s’agit tout simplement de l’endroit en Islande où l’on trouve le plus de galeries d’art et de magasins de design que dans tout le reste du pays.
La petite église bleue (Bláa Kirkjan) d’inspiration Norvégienne est le symbole du village. On y trouve aussi des maisons typiquement scandinaves et donc très colorées qui se reflètent magnifiquement dans la mer, ce qui fait de ce port l’un des plus pittoresques du pays.
Enfin, à l’extrémité du fjord de Seydisfjordur se trouve la Réserve Naturelle de Skalanes. Outre ses paysages magnifiques, les amateurs d’avifaune y trouveront une colonie importante d’eiders…
Akureyri : des chutes et des marmites bouillonnantes
En remontant l’Islande, voici Akureyri, la ville plus au nord puisqu’elle n’est qu’à une cinquantaine de kilomètres au sud du Cercle Polaire ! C’est un important port maritime et la quatrième ville d’Islande, mais la deuxième agglomération en habitants derrière Reykjavik. Blottie sur les bords du fjord Eyjafjörödur et du fleuve Glera, elle est entourée de montagnes. La zone du fjord située entre Oddeyri et sa fin est connue sous le nom de Pollurinn (le bassin) et aussi pour ses vents calmes et son port naturel.
Nous partons à la découverte des belles chutes de Fossholl puis à Namafjall, une zone de haute température comportant des évents de vapeur et des marmites de boue. A 1000 mètres de profondeur la chaleur dépasse 200 degrés Celsius. La vapeur est accompagnée de divers gaz tels l’hydrogène sulfuré qui donne aux sources chaudes leur odeur caractéristique. Des mines de soufre étaient exploitées autrefois en Islande pour la production de poudre à canon.
Nous explorons ensuite, le site des laves de Dimmuborgir qui furent créées par une éruption datant de 2.300 ans ! Pour clore cette journée « découverte » les images de volcans et de lacs rencontrées valent à elle seules le voyage !
Isafjordur, le fjord de glace…
Isafjordur (littéralement fjord de glace) est située dans le nord-ouest de l’Islande que nous sommes en train de contour ner. C’est la ville la plus peuplée qui s’est historiquement développée sur un banc de sable dans le fjord Skutulsfjordur avant de s’étendre peu à peu le long de celui-ci. En 1786, la Couronne danoise lui offre le statut de ville. Ce qui va lui permettre de se développer plus rapidement, notamment grâce à son port de pêche et de commerce et à l’essor de l’industrie de la crevette.

La plus importante collection de maisons à colombages d’Islande se situe dans le centre historique de la ville. Construites en bois et fer blanc, elles furent principalement bâties à l’initiative de commerçants étrangers dans la seconde moitié du 18ème siècle. Aujourd’hui, l’industrie de la pêche est devenue minoritaire, en raison de la diminution des ressources dès les années 1980 et des restrictions du gouvernement à la même période. L’économie de la région s’est tournée vers le tourisme et l’industrie de la haute technologie.
En 1991 est prise la décision de construire une nouvelle église afin de remplacer l’ancienne datant du 19ème siècle qui avait été détruite lors d’un incendie en juillet 1987. Cette église qui représente les vagues de la mer et dont la construction a débuté à l’automne 1992 a été conçue par Grobjarture Grobjarsson. Elle a été inaugurée en 1995.
Le soleil de minuit : on en rêvait !
Côté calendrier, nous sommes en plein solstice d’été : le 21 juin ! Et à quoi rêve-t-on lorsqu’on se trouve à ces latitudes un 21 juin ? Evidemment pas à la Fête de la Musique mais au soleil de minuit ! Nous avons vraiment eu la chance de pouvoir dire « On l’a vu… Il existe bien ! ». L’attente fut longue à guetter sur le balcon de notre cabine (qui avait la chance de se trouver du bon côté des réjouissances !). Des heures vigilantes entre minuit et 2 heures 30 du matin pour que l’astre solaire veuille bien décliner, plonger dans l’océan puis remonter – comme par magie – sans qu’il n’y ait eu de nuit : inoubliable !
Reykjavik, la « Baie des Fumées »
Dernière étape en Islande : Reykjavik, sa capitale ! Reykjavik tient son nom du Landnamabok (Livre de la colonisation) qui mentionne les vapeurs qui proviennent des sources d’eau chaude de la région. En Islandais, Reykjavik signifie «Baie-des-Fumées». Elle se situe à environ 250 km au sud du Cercle Polaire Arctique, ce qui en fait la capitale la plus septentrionale d’un Etat souverain (la capitale du Groenland, Nuuk se trouvant quelques kilomètres plus au nord).
Reykjavik s’étale entre deux fjords, dans une zone comptant de nombreuses sources d’eaux chaudes le long d’une baie (vik en islandais). Elle est ainsi considérée comme la ville la « plus verte du monde » : on y compte environ 410 m2 d’espaces verts par habitant. C’est aussi la ville la plus peuplée du pays avec… 130.000 habitants ! Avec son agglomération, elle regroupe pratiquement les deux tiers de la population de l’île, soit environ 220 000 habitants.
Le centre historique, piétonnier, aux pavés arc-en-ciel, vaut vraiment le détour avec ses maisons colorées et ses boutiques « souvenirs » où une grande place est donnée aux pulls et autres écharpes ou bonnets, tous fabriqués sur place à partir de laine locale. Il faut dire qu’il y fait froid… même en plein été ! Evidemment, ne pas oublier aussi les incontournables « vikings » que l’on retrouve à toutes les sauces : magnets, porte-clés, figurines, bijoux… Largement de quoi alimenter tout l’imaginaire des voyageurs…
La rue piétonne débouche à Hallgrimskirkja, une église luthérienne située au sommet d’une ancienne colline. Construite de 1945 à 1986, elle est en béton et sa flèche mesure 75 m. Elle est le plus haut bâtiment du pays. Son orgue possède plus de 5 200 tuyaux. La statue au pied de l’église, offerte par les Etats-Unis, représente Leif Eríkson, fils d’Erik le Rouge et l’un des premiers Européens connus à avoir découvert l’Amérique du Nord presque 500 ans avant Christophe Colomb !
Le « Cercle d’Or » de l’Islande : les sites qu’il ne faut pas rater !
Les trois sites touristiques les plus fréquentés d’Islande sont nommés « Cercle d’Or ». Il s’agit du Parc National de Pingvellir classé au Patrimoine Mondial de l’Unesco, des chutes de Gullfoss et du champ géothermique de Geysir. Nous avons choisi l’excursion organisée pour partir à leur découverte.
– Le Parc National de Þingvellir offre sa faille volcanique de 7,7 km de long aux visiteurs. Cette faille forme un véritable canyon et de nombreux lacs. Il est classé au Patrimoine de l’Unesco depuis 2004. De nombreux passages de « Game of Thrones » y ont été tournés. Ces paysages ont marqué l’Islande car c’est le lieu original d’un des plus vieux parlements du monde : l’Alping fondé en 930 ! Le mot « Pingvellir » signifie « Plaine du Parlement ».
– La Gullfoss, toponyme islandais signifiant littéralement en français « les chutes dorées » est une cascade située sur la Hvítá, dans le sud-ouest du pays. Elle est composée de deux sauts dont un de 21 mètres de hauteur qui voit les eaux de la rivière s’engouffrer dans une gorge étroite. Elle constitue l’un des sites touristiques les plus populaires d’Islande, tout proche du site de Geysir.
– Le champ géothermique de Geysir est un ensemble de sources chaudes, d’un dôme et d’un cône volcanique qui constituent les restes d’un ancien volcan. Le champ géothermique de Geysir est situé à environ 60 km à l’est de Reykjavik à la limite des Hautes Terres et à l’entrée de la petite vallée de Haukadalur. Il est composé d’un stratovolcan érodé dont les restes sont constitués de la Laugarfjalll, un dôme de lave culminant à 187 mètres d’altitude, de la Bjarnarfell, un cône volcanique basaltique qui se trouve juste à l’ouest, le point culminant avec 727 mètres d’altitude, mais surtout d’un ensemble de sources d’eaux chaudes. Il constitue l’un des sites géothermiques et touristiques les plus importants du pays, notamment grâce à ses geysers comme Geysir et Strokkur, le seul encore actif.
Autre anecdote pour les passionnés de littérature : Au Nord de Reykjavik, le volcan Snaefellsjökull est mentionné par Jules Verne dans son roman « Voyage au Centre de la Terre » (1864) comme le seul passage pour accéder aux entrailles de la Terrre ! Evidemment, ce « passage » est strictement issu de l’imagination fertile du romancier !
Surtey, une île surgie des eaux !
Nous sommes sur le chemin du retour… Surtsey est une jeune île volcanique située au large de la côte méridionale de l’Islande, à l’extrémité sud des îles Vestmann. Surtsey, qui signifie en français « Île de Surt », tire son nom de Surt, l’équivalent islandais de Vulcain chez les Romains ou Jötunn, Dieu du feu de la mythologie nordique.
Elle s’est formée à la suite d’une éruption qui a commencé à 130 mètres sous le niveau de la mer le 10 novembre 1963 et a atteint la surface le lendemain. La naissance de l’île s’est terminée le 5 juin 1967. A cette date, l’île a atteint sa superficie maximale : 2,65 km2 et sa hauteur de 173 mètres. Depuis, sous l’action érosive du vent et des vagues, elle a diminué de superficie pour ne mesurer plus que 1,41 km2 en 2008. Dès son apparition, l’île a été étudiée par de nombreux volcanologues et depuis la fin de son éruption, elle suscite l’intérêt des botanistes et des zoologistes car la vie a peu à peu colonisé cette nouvelle terre vierge. Pour cette raison, elle est interdite d’accès au public. Seuls les scientifiques sont autorisés à s’y rendre. Surtsey est inscrite comme site du Patrimoine Mondial de l’Unesco depuis 2008.
Surtsey est un modèle en termes de volcanisme et a permis de mieux comprendre le mode de formation des différentes îles de l’archipel des îles Vestmann. De plus, c’est un des tuyas sous-marins les mieux préservés au monde. Pour ces raisons, c’est l’un des volcans les plus étudiés et observés d’Islande. Il a donné son nom à un type éruptif appelé « surtseyen » qui définit les volcans entrant en éruption sous quelques mètres d’eau. Nous nous contenterons de l’observer du bateau… Nous avons fini notre « Tour d’Islande »… Bien sûr la frustration de n’avoir fait que passer et d’avoir raté tant de belles choses de cette île mystérieuse, envoûtante et pleine de charme… Faudra y revenir… Peut-être…
Trois jours de mer nous ramèneront sur les côtes irlandaises pour une escale à Belfast… Mais la cité irlandaise a déjà fait l’objet d’un reportage. Lien : https://www.grand-sud-mag.com/nord-de-lirlande-lirlande-nord/
Reportage : Texte/Dany Antonetti – Images/Gérard Antonetti – © Juin 2025