Aude : la Côte du Midi

La Côte du Midi, c’est le nom qu’ont choisi récemment les habitants du Narbonnais pour qualifier leur territoire entre arrière-pays, vignes, oliviers, canaux, lagunes et étangs mais aussi immenses plages de Narbonne à Gruissan en passant par Port-la-Nouvelle… Un terroir fertile en découvertes culturelles, naturelles, gastronomiques… que nous étions conviés à découvrir au cours d’un long week-end partagé entre les travaux de l’Assemblée Générale des Journalistes de Tourisme (AJT) à laquelle j’appartiens et un circuit à travers le département dont il fallait choisir la thématique… Il y a tant de choses à voir dans cette belle partie d’Occitanie riche de 34 villages que forcément ce reportage n’en serait qu’un minime aperçu !

Narbonne la Romaine

La galerie lapidaire constituée de pierres funéraires narbonnaises ( rapatriées du Musée Lapidaire qui se situait derrière les Halles) est le top du musée : l’architecte Foster et son scénographe ont créé un mur gigantesque dont les blocs se déplacent ! Impressionnant…

Commençons par les origines : la création de cette ville plus d’un siècle avant notre ère ! En effet, la cité antique de Narbo Martius fut la première colonie romaine fondée en Gaule en 118 Avant JC… Mais contrairement à Nîmes ou Arles il ne reste plus rien, aujourd’hui, de cette ville gallo-romaine au passé illustre. Pour renouer ce lien avec ces siècles d’histoire oubliés, l’EPCC (Etablissement Public de Coopération Culturelle) Narbo Via a été créé le 1er février 2020 à l’initiative de la Région Occitanie, de la Communauté d’agglomération du Grand Narbonne, de la Ville de Narbonne et de l’Etat. Le musée Narbo Via a ouvert ses portes le 19 mai 2021 à l’entrée Est de la ville, le long du canal de la Robine. Riche d’une collection permanente de 7.000 pièces, il a été conçu par l’agence Foster & Partners (déjà à l’origine du Viaduc de Millau ou du Carré d’Art à Nîmes).

Le musée propose un parcours d’expositions sur 3.200 m2, avec notamment des peintures murales, des fresques, des statuts, des amphores, ainsi qu’un ensemble exceptionnel de 760 fragments de monuments funéraires répartis sur un mur animé unique en Europe.

L’exposition temporaire « Narbo Martius, renaissance d’une capitale » immerge le visiteur dans cette ville romaine reconstituée en images de synthèse sur un écran panoramique à 180° : bluffant de réalisme !

Narbo Via possède aussi un pôle de recherche archéologique, véritable lieu de vie, avec des jardins, un auditorium, une boutique et un restaurant. Au musée s’ajoutent le site des potiers gallo-romains Amphoralis et les galeries souterraines de l’Horreum. Site : narbovia.fr

Le bleu de cette fresque n’existe qu’à Narbonne… et Pompéi !

Le Somail, une escale sur le Canal du Midi…

Direction le hameau du Somail, ensemble architectural construit en même temps que le canal, classé par les monuments historiques et inscrit au Patrimoine Mondial de l’Unesco.

Créée pour le transport de marchandises, la voie navigable était utilisée aussi pour le déplacement des personnes. Le Somail constituait une étape importante, celle de la « couchée ». Le hameau disposait des équipements indispensables au confort (sommaire) des voyageurs : auberge, glacière pour la conservation des aliments, chapelle…

Marga Serrano nous accueille à l’Office de Tourisme, reconstitution de l’ancienne auberge du Somail qui recevait les passagers de la « Barque de Poste ». Là nous visionnons (grâce à un hologramme) l’épopée au fil de l’eau d’une certaine Madame Cradock, touriste britannique qui emprunta la voie en 1786 ! Les images virtuelles reconstituent son voyage qui fut authentifié grâce à son carnet de bord ! Le trajet de Béziers à Toulouse est prévu en 4 jours dit Mme Cradock et c’est avec un humour typiquement British qu’elle raconte ce voyage peu digne de son rang malgré l’intérêt des paysages parcourus. Très drôle !!!

Madame Cradock

Marga nous explique ensuite, maquettes à l’appui, la création des 3 canaux autour de Narbonne. D’abord, bien sûr, le Canal du Midi avec ses 240 km navigables de Toulouse à la Méditerranée édifié entre 1667 et 1694 par Pierre-Paul Riquet et qui constitue l’une des réalisations de génie civil les plus exemplaires ouvrant la voie à la révolution industrielle… Ensuite, le Canal de la Robine (mis en service par Vauban en 1686), long de 32 km, tantôt urbain à Narbonne et tantôt nature au coeur des lagunes, termine sa course à Port-la-Nouvelle sur la Méditerranée. Et pour finir, le Canal de Jonction reliant Narbonne au Canal du Midi, long de 5,5 km avec 7 écluses, qui sera inauguré en 1780 ».

Le pont dit « de Riquet » est remarquable par sa voûte en « anse de panier » : il fut construit en même temps que le canal.

La Librairie « Le trouve tout du livre »

On ne peut pas visiter le hameau de Somail sans faire une halte à cette librairie ancienne renfermant quelque 70.000 volumes, la plupart d’occasion.

« Cette librairie fut créée en 1980 par mon père Raymond, dit l’actuelle propriétaire Nelly Bourgues. (Il possédait déjà une librairie à Paris dans le 20ème dans les années 60). J’avais 13 ans lorsque nous avons emménagé ici. Depuis nous y sommes restés et on s’est agrandi. Les collègues de mon père l’appelaient « le trouve tout »… Il est décédé en 1996 et ma mère a tenu la librairie jusqu’en 2010 où elle a pris sa retraite. J’ai accepté de reprendre le flambeau. En 2012 j’ai commencé à faire des agrandissements. J’espère pouvoir former un neveu ou une nièce »… On resterait des heures à consulter au hasard des ouvrages… Mais notre timing est exigeant : nous nous dirigeons, devant l’Office de Tourisme vers notre navire…

Le Canal du Midi au fil de l’eau

Embarquement immédiat à bord de la gabarre « La Capitane » où nous attendent Rodolfo, le Capitaine et Axelle, la guide. « La gabarre, dit Axelle, c’est un bateau à fond plat qui servait autrefois au transport des marchandises. Le Canal du Midi traverse le département de l’Aude d’ouest en est, des plaines du Lauragais, au littoral méditerranéen, en passant par Castelnaudary, Carcassonne, Narbonne. Alimenté par un système très sophistiqué, il présente les plus anciennes inventions en termes de maîtrise hydraulique et d’ouvrages d’art : écluses, ponts, aqueducs, épanchoirs … dont certains n’ont pas été modifiés depuis leur origine ! En France nous avons 8500 km de voies navigables, ce qui est unique en Europe ». Evidemment, notre navigation se résumera au passage d’une seule écluse, celle de Cesse où nous devons continuer à vélo !

A VTT sur le chemin de halage, de Cesse à Argeliers

Tom et Thomas, les prestataires de Big Up Cycling ont préparé VTT assistés et trottinettes électriques pour cette belle balade d’une heure jusqu’au Mas d’Antonin. Après une petite averse, le soleil est gentiment revenu afin que nous puissions profiter pleinement de l’activité. Tous adoptent une bonne allure au bord du canal et l’arrivée rapide à Argeliers nous fera presque regretter de ne pas avoir pris plus de temps pour admirer la nature audoise ! Site : bigupcycling.com

Le Mas d’Antonin entre truffe et oliviers…

Arrivée en pleine garrigue, entre chêne verts et oliviers au Mas d’Antonin. Notre hôte, Elena, est multi-cartes puisqu’elle propose des présentations oléicoles, le cavage de la truffe en saison (décembre à février), l’atelier « Truffe », une table d’hôte, des gîtes, une boutique avec tous ses produits… « Mon arrière-grand-père s’appelait Antonin, dit Elena, et nous sommes sur ses terres… Après une autre vie, je suis revenue ici à mes racines pour perpétuer ce goût de la terre audoise. J’ai reconstitué son domaine et plus encore puisque j’ai environ 1.000 oliviers… Notre récolte d’olives commence tôt : début octobre, de façon manuelle afin d’obtenir des huiles au goût intense et aux arômes herbacés. Nous produisons essentiellement des Lucques et des Olivières mais pour étendre notre palette aromatique, nous avons aussi planté de l’Aglaudau et la Picholine ». A l’heure de passer à table, Elena nous apprendra comment sentir, déguster le fruité, l’amertume, l’onctuosité… Une véritable initiation à l’oléologie !

Le Mas d’Antonin, c’est aussi la truffe : Elena a replanté des chênes mycorhizés sous lesquels naît la Tuber Melanosporum, le Diamant Noir ou plus communément, la truffe noire ! Avec elle et son chien, le vacancier pourra se familiariser à la recherche de ce trésor ! Toutes les infos sur le site : le-mas-d-antonin.com

L’Oulibo labellisée par l’état « Entreprise du Patrimoine Vivant »

Pour finir cette exceptionnelle journée de découvertes autant culturelles que naturelles ou gastronomiques, voici la Coopérative l’Oulibo créée en 1942 et actuellement la seule Coopérative oléicole du département de l’Aude qui reçoit aussi les olives de l’Hérault et des Pyrénées Orientales avec près de 1.000 adhérents et la production de 90.000 litres par an. Grâce à son savoir-faire exceptionnel, elle a été labellisée « Entreprise du Patrimoine Vivant » !

Jean Marc Thibault responsable du tourisme nous y accueille pour nous évoquer ce savoir-faire qui fête ses 80 ans ! « Toutes les olives peuvent faire des olives de table, dit-il, il faut cependant que la proportion de chair soit suffisamment importante. Les olives sont de tailles et de couleurs différentes en fonction de leur variété, du climat, des méthodes de culture et de leur maturité. A noter : il n’existe pas d’olives noires : toutes les olives sont vertes ! C’est en Octobre qu’elles dévoilent une robe aux couleurs automnales…

Il existe près de 1000 variétés d’olives à travers le monde. À l’Oulibo, ce sont deux variétés qui sont principalement traitées en confiserie : la Picholine et la Lucques à la forme singulièrement allongée. La cueillette manuelle est obligatoire ! Oui, la « confiserie », curieusement ce sont les olives d’apéro !!! La coopérative l’Oulibo est aujourd’hui la plus grosse confiserie d’olives française et le plus gros producteur d’olives Lucques au monde et on apprend même que le « catador », est l’oenologue de l’huile d’olive ! « La culture de l’olivier est particulière en France, poursuit Jean-Marc : on va trier les olives une à une à la main ! Notre marché est une niche : on va en trouver peu ! Nous sommes les artisans de l’huile d’olive avec des arbres entre 50 et 80 ans. L’olivier ne meurt jamais : là où il renonce s’arrête la Méditerranée ! » Une belle boutique propose, outre l’huile de nombreux produits dérivés. Site : loulibo.com

L’Abbaye de Fontfroide by night

Fondée à la fin du 11ème siècle et rattachée en 1145 à l’Ordre de Coteaux, l’abbaye devint l’une des plus puissantes abbayes cisterciennes d’Europe et joua un rôle crucial contre les Cathares avant de connaître un long déclin à partir du 14ème siècle. L’ensemble monastique est magnifiquement conservé, avec son cloître et sa salle capitulaire du 12ème siècle, une somptueuse église abbatiale et ses vitraux modernes. C’est dans ce lieu majestueux que nos hôtes avaient organisé une soirée de gala pour tous les journalistes. Avec ses 130.000 visiteurs par an, ses séminaires et soirées, le lieu (privé) compte bien devenir un incontournable de la culture locale. Site : fontfroide.com

Balade sur le Canal de la Robine

Comme le canal du Midi, le canal de la Robine est inscrit sur la liste du Patrimoine Mondial de l’Unesco. Il parcourt 32 km et commence, en son point le plus haut, au bord de l’Aude pour se diriger vers Narbonne où nous embarquons pour une petite balade. Son point de départ est l’écluse de garde de Moussoulens, qui protège Narbonne en cas de crue.

Le canal passe sous le pont des Marchands à Narbonne qui est l’un des rares ponts habités de France (Notre photo de « Une »). Il longe ensuite les étangs de Bages et de Sigean et la réserve naturelle de l’Île-Sainte-Lucie. Il termine sa course dans la mer Méditerranée au port de commerce de Port-la-Nouvelle. Six écluses jalonnent son parcours. Le chemin de halage est aménagé en voie verte du centre de Narbonne jusqu’à Port-la-Nouvelle.

Les Halles de Narbonne, plus Beau Marché de France 2022

Les Halles de Narbonne sont célèbres dans tout le Grand Sud.  Le pavillon de style Baltard (1901) vient d’être élu « plus Beau Marché de France 2022» le 30 juin dernier par le journal de 13 heures de TF1 ! Cette halle abrite plus de 70 commerces : boulangers, pâtissiers, bouchers, charcutiers, traiteurs, tripiers, poissonniers, primeurs, volaillers, épiceries fines bars et mêmes cavistes. On y retrouve tous les produits du terroir : huîtres, miel, huile d’olive… et le vin, bien sûr ! On y fait ses courses mais il est aussi possible de s’y restaurer en toute convivialité. Site : narbonne.halles.fr

Puisqu’il fallait faire de difficiles choix en matière de découvertes, je n’ai pas eu l’opportunité de visiter Narbonne et ses monuments, d’évoquer l’immense Trenet qui mettait tant de joie dans cette Douce France… ni le Pays Cathare, ni la Route du Sel, ni la petite Camargue… A suivre pour d’autres sujets !


Reportage Texte & Photos Dany Antonetti / Copyright Octobre 2022


Les vins du Languedoc : Quel est le cépage ?

Le cépage, c’est tout simplement la variété de raisin. Ici, sur la Côte du Midi, les cépages méridionaux emblématiques pour le vin rouge sont le grenache noir, la syrah, le carignan et le mourvèdre. Pour les blancs : le grenache blanc, le vermentino, la roussane, le Bourboulenc et la marsanne… Avec la pratique on peut reconnaître un cépage au goût. Nous avons pu apprécier une sélection de ces vins proposée par le Conseil Interprofessionnel des AOP du Languedoc et des IGP Sud de France. Au cœur du Languedoc, le maître mot est diversité : Fitou, Corbières, Minervois, Livinière, Clape, Quatourze, Cabardès, Malepère, Limoux. Ici le vin est un art de vivre, avec une très large gamme de produits de qualité, 9 appellations d’origine, rouge, rosé, blanc et pétillant. 4 territoires labellisés “Vignobles & Découvertes” couvrant l’ensemble du vignoble audois.

Au cours du dernier déjeuner, échange rituel de souvenirs : notre Président AJT, Gil Giglio, s’est vu remettre l’emblématique van qui diffuse la communication estivale de la Côte du Midi par le Maire de Narbonne, Didier Mouly, en présence du Président de l’ADT Aude, Didier Aldebert et de Christophe Bousquet, Président des vins du Languedoc.


CARNET DE ROUTE


Château Capitoul

Perché depuis le 19ème siècle au sommet d’une colline du massif de la Clape dominant un paisible lagon méditerranéen, le Château Capitoul règne sur un domaine viticole de 80 hectares. Le château comprend peu de chambres mais 44 villas indépendantes (où nous avons logé) y ont été construites dans l’esprit du Midi, toutes possédant une terrasse et un jardin privés, et la plupart jouissant d’une piscine privative. C’est ici, dans le hameau, que le court de tennis et le boulodrome ont élu domicile, tout comme la colossale piscine à débordement, sa terrasse ombragée d’oliviers et son bar. Pour la restauration, on a le choix entre un « Gastronomique » dirigé par Valère Diochet et un Bar-Brasserie « Asado » situé dans l’ancien chai. A côté de la réception, les vins du vignoble Bonfils (Nom des propriétaires) et d’autres domaines sont disponibles à la dégustation et à la vente. L’établissement est aussi doté d’un spa Cinq Mondes. Site : chateaucapitoul.com

– REMERCIEMENTS : Un grand Merci à Caroline Combis (ADT Aude Tourisme) et à Virginie Sire (Côte du Midi) pour leur gentillesse et leur disponibilité au cours de ce séjour qu’elles ont organisé pour 80 journalistes !

  • Sites pour préparer son séjour :

cotedumidi.com ; audetourisme.com ; narbovia.fr ; payscathare.org ; legrandnarbonne.com ; narbonne.fr