Située au Nord Est de la Péninsule Ibérique, la Catalogne (Catalunya en Catalan) est une communauté autonome d’Espagne, véritable Nation reconnue par le gouvernement espagnol. José Montilla est, depuis 2006, le 128ème président du Gouvernement de Catalogne, la « Generalitat de Catalunya ». Depuis plus de 10 siècles, la Catalogne mise sur sa spécificité et conserve son drapeau « sang et or », sa langue et son identité.
L’Art Roman est la première manifestation artistique commune à l’Europe. Il se situe de la fin du premier millénaire jusqu’au 13ème siècle (où il laisse la place au Gothique) et prend racine en Italie du Nord (Lombardie) pour se propager ensuite sur toute l’Italie puis sur le continent. Son expression, en Catalogne, correspond à la reconquête du Nord de l’Espagne par les Chrétiens. Nous avons suivi le « Chemin du Roman » à travers la Catalogne, de Gérone à Vic, puis Ripoll, la Seu d’Urgell, la Vall de Boi (où les églises rurales bénéficient du label « Patrimoine Mondial de l’Humanité » de l’UNESCO), Taüll ou Sant Cugat pour terminer à Barcelone où le Musée National d’Art de Catalogne (MNAC) conserve de nombreux originaux de tous ces lieux visités.
La spécificité de la conservation des œuvres d’art en Catalogne (comme en Espagne) jusqu’à une époque très récente consiste à les retirer (ou « déposer ») de leur édifice d’origine pour les mettre à l’abri dans des musées. La technique dite « de déposition » ou « strappo » a été inventée en 1918 et a permis la sauvegarde de nombreuses pièces vouées au pillage des marchands d’art. D’abord, on applique sur la peinture murale plusieurs couches de toile imbibée de colle organique soluble dans l’eau. Quand les toiles sont sèches, on les arrache du mur avec un ciseau et un marteau. Ainsi la couche picturale est prélevée avec la toile. On conditionne ensuite les toiles pour les expédier au musée où les peintures seront transférées sur un nouveau support. La colle organique sera diluée avec de l’eau chaude pour séparer les toiles de la couche picturale comme s’il s’agissait d’un adhésif. Aujourd’hui, toutes les nouvelles découvertes du passé sont plutôt laissées sur le lieu de leur création.
Gérone, ville médiévale
Gérone (Girona en catalan) est la « ville aux mille sièges » puisqu’elle fut assiégée de nombreuses fois au cours des siècles. On lui donna aussi le titre de « Trois fois immortelle » puisqu’elle résista, à trois reprises, aux troupes de Napoléon. C’est une ville en forme de triangle, véritable oppidum fortifié dont les remparts ont été partiellement détruits (Il reste 2 km de l’ancien chemin de ronde). Le centre historique est un ensemble médiéval exceptionnel : les maisons et les ponts (dont le pont de Ferro conçu par l’équipe de Gustave Eiffel) sur la rivière Onyar lui donnent un cachet authentique.
Gérone fut le lieu d’accueil d’une importante communauté Juive très ancienne sans doute arrivée là au premier siècle de l’ère chrétienne après la destruction du Temple de Jérusalem. Cette présence juive est répertoriée depuis le 9ème siècle et vers 1160 le quartier juif appelé « call » (dérivé du mot latin « callis » signifiant « rue ») se distingue par ses ruelles de pierre et sa structure en labyrinthe. La communauté, après une ordonnance de quitter les lieux en 1448, sera définitivement chassée en 1492. Cependant le quartier a miraculeusement traversé les siècles.
La cathédrale de Gérone, à la façade baroque, abrite la plus large nef gothique au monde (voûte de 23 mètres, 37 mètres de haut et 54 mètres de long). La montée s’effectue par la « Pujada de Sant Domènec » faite de 90 marches. De l’église romane d’origine, il reste la « Tour Charlemagne » et le cloître avec ses chapiteaux et ses frises sculptées de scènes bibliques ou de motifs ornementaux. La chaise de marbre dite de « Charlemagne » est à l’intérieur du Maître Autel. La légende dit que Charlemagne aurait trouvé une mosquée à cet emplacement et qu’il y aurait fait dire une première messe… En fait, suivant les historiens, « l’Empereur à la barbe fleurie » ne serait jamais venu à Gérone !
Cathédrale de Gérone
Les pièces les plus précieuses sont exposées au Musée Capitulaire : la
Tapisserie de la Création (11ème siècle) racontant l’histoire du monde et le Beatus de Gérone (10ème siècle) commentant l’Apocalypse. Le
« Béatus » est un ouvrage enluminé (peint) inventé par un moine espagnol (mort en 798) du même nom. Par extension, le terme « Béatus » désigne les 31 livres du même type recensés.
Les Bains Arabes (12ème siècle) sont un édifice roman imitant la structure des anciens bains maures. En fait, ces bains sont médiévaux plutôt qu’arabes (terme qui leur a été affecté seulement au 19ème siècle) ils représentent un exemple rare d’architecture civile médiévale et doivent leur conservation à un couvent de capucines adjacent qui s’en servaient régulièrement.
Vic, un musée exemplaire…
Vic, à 70 km de Barcelone est à mi-chemin entre la mer et les Pyrénées. La ville offre un riche patrimoine tout en étant ancrée dans notre époque. La Place du Marché « Plaça Major » est le cœur de la ville où – depuis le Moyen-Age – se tient le marché les mardis et samedis. Les arcades présentent, dans leurs diversités de formes et d’époques, une vraie unité.
En plein centre historique de Vic, le Musée Episcopal (MEV) est un musée catalan d’art médiéval d’intérêt national. Le nouveau bâtiment (inauguré en 2002) a pris place dans le quartier médiéval. Ses architectes, Correa et Milà se sont inspirés de la spécificité moyenâgeuse des lieux pour optimaliser l’exposition.
Ainsi, l’immense baie vitrée dans le hall d’entrée ouvre-t-elle sur le clocher roman (1038) de la cathédrale pour une perspective éblouissante de lumière. Ce musée « recréé » a déjà une longue vie devant lui puisque sa fondation remonte à 1891 pour conserver les pièces de peinture catalane et autres objets liturgiques originaires de l’évêché de Vic. Sa collection très importante – l’une des plus conséquentes d’Europe avec celle du musée de Barcelone – réunit 23.000 objets mis en scène d’une façon moderne, sobre et thématique.
La Descente de la Croix d’Erill la Vall (Santa Eulalia) occupe une place d’honneur ainsi que le baldaquin de la Vall de Ribes et l’ensemble de parements d’autels. La collection des étoffes et vêtements liturgiques est présentée dans un espace indépendant qui permet d’en contrôler l’intensité de la lumière et la température pour une meilleure conservation. Le parcours se termine au 2ème étage avec les collections de cuirs, orfèvrerie, fer forgé et céramique. Le 3ème étage est consacré à la restauration et la bibliothèque.
Josep Maria Trullén, Conservateur en Chef, nous a accompagnés dans la découverte des trésors du bâtiment. Passionné et intarissable sur l’Art Roman, Monsieur le Conservateur est fier de présenter le nouveau « Guide des Collections » en Français à peine sorti des presses. « Un outil, dit-il, qui devrait satisfaire tous les visiteurs francophones intéressés par nos collections ». (Internet :http://www.museuepiscopalvic.com)
Ripoll, capitale de la « Vieille Catalogne »
C’est le véritable berceau de l’identité catalane. Le Monastère de Santa Maria a été fondé au 9ème siècle par Wilfred le Velu. Il renferme d’ailleurs sa sépulture (840-897). Une légende lui attribue l’origine des 4 bandes rouges du drapeau catalan : Wilfred, dit « le Velu » se fit reconnaître de Salomon et lui imposa un duel. Mortellement blessé, Salomon fut étendu sur le sol. Son adversaire plongea alors la main dans la plaie saignante et traça sur un écu d’or quatre traces verticales du bout des doigts : le drapeau ou « senyera » catalan était né, « Sang et or », et pas « rouge et jaune » il y a plus de 11 siècles…
Le Monastère de Santa Maria a joué un rôle majeur dans l’histoire de la Catalogne et le portail de pierre sculptée (12ème siècle) appelé aussi « Bible de Pierre » est une œuvre fondamentale du Roman européen. Il reproduit des scènes de vie des rois David et Salomon, de Moïse et des prophètes. Malheureusement toute la polychromie est perdue. Le cloître à deux étages a été achevé au 16ème siècle et seule la galerie nord est totalement romane. Les chapiteaux représentent des figures humaines ou fantastiques, des animaux et des motifs végétaux.
Le Monastère de Saint Joan les Abbesses a aussi été fondé par Wilfrid le Velu pour y placer sa fille Emma à la tête des Bénédictines. Il renferme un groupe de sept statues « Le Très Saint Mystère » (13ème siècle) représentant la descente de la Croix, exemplaire unique de transition du roman au gothique. Les personnages à la droite du Christ sont les « bons » et à sa gauche, les « mauvais ». Au Moyen-Age, on croit que tout ce qui est laid est diabolique car pas concordant avec l’image de Dieu… Le cloître du 15ème siècle est de style gothique catalan.
La Seu d’Urgell, capitale des Pyrénées catalanes
Cathédrale de la Seu d’Urgell
La Seu d’Urgell fut, au 12ème siècle, le siège d’un puissant évêché (« seu » signifie « siège » en catalan). D’après la légende, la cité aurait été fondée par Hercule. Le marché, qui s’y déroule deux fois par semaine, est signalé par les textes depuis 1026 ! La cathédrale Santa Maria (formée de la réunion de trois églises) aux fortes tours, souligne l’influence lombarde. Le musée diocésain, près du cloître (13ème siècle), rassemble une collection d’objets d’art sacré dont un« Béatus » du 10ème siècle.
La Seu d’Urgell : cloître de la cathédrale
Le Parc Olympique del Segre jouxte le centre historique. Les aménagements réalisés pour les J.O. de Barcelone en 1992 y sont encore opérationnels comme la rivière bouillonnante pour les épreuves de kayak.
Le Vall de Boi et ses églises
classées au Patrimoine Mondial
Santa Eulalia à Erill la Vall, en arirère plan, l’hôtel de la Place
Le Vall de Boi est une vallée étroite et encaissée des Pyrénées espagnoles – dans la région de l’Alta Ribagorça – située à l’ouest de la Catalogne. L’ensemble roman comprend 8 églises inscrites au Patrimoine Mondial de l’Humanité par l’UNESCO depuis 2000 : Sant Climent et Santa Maria de Taüll, Sant Joan de Boi, Santa Eulàlia d’Erill la Vall, Sant Feliu de Barruera, la Nativitat de Durro, Santa Maria de Cardet, l’Assumpcio de Coll et l’ermitage de Sant Quirc de Durro.
Eglise de Sant Climent
Leur remarquable unité architecturale provient du modèle de l’Italie du Nord qualifié de roman lombard. Le Centre d’Interprétation du Roman dans la Vallée de Boi à Erill la Vall vous propose explications et itinéraire de découverte (Internet :
http://www.vallboi.com). Les peintures murales originales sont conservées au musée de Barcelone (MNAC) ainsi que toutes les sculptures produites par l’atelier d’Erill la Vall comme la
Descente de Croix de Santa Eulalià. Les églises bénéficient cependant de reproductions fidèles. L’intérêt pour l’art médiéval de Catalogne est né au 19ème siècle avec les voyages historico-littéraires et le mouvement « Renaixença » que l’on peut associer au romantisme français.
Et, comme on ne saurait se contenter de nourritures spirituelles, on fera une halte à l’Hôtel de la Place «
Hostal la Plaza » à
Erill La Vall, juste en face de l’église. Bois, pierre, ardoise… Xavier et Oriol vous accueilleront dans ce coin secret des Pyrénées pour vous faire profiter d’une ambiance authentique montagnarde, vous conseiller dans les balades et vous mitonner des plats du terroir exquis ! Une adresse à partager seulement avec ses amis… (Internet :
http://www.hostal-laplaza.com)
Cloître de Saint Cugat
Sur la route du retour, et dans la périphérie de Barcelone, le Monastère de Saint Cugat del Vallès mérite une visite. C’est une ancienne abbaye bénédictine composée d’une église et d’un cloître à deux galeries avec, au centre, une fontaine à deux vasques. Le cloître abrite le musée de Saint Cugat.
Barcelone : Le Musée National d’Art de Catalogne
Bref passage à Barcelone, histoire de faire une petite révision du « Chemin du Roman » et d’admirer les originaux ôtés des églises. Le MNAC est abrité dans un bâtiment de 1929 créé pour l’Exposition Universelle, le Palais National situé au pied de Montjuïc. On jouit d’un superbe panorama sur la ville (A ne pas rater la superbe salle du Restaurant Oleum). L’immeuble éclectique contraste avec les autres constructions du début du 20ème siècle puisqu’il a été repensé entre 1990 et 2004 par les architectes ayant reconfiguré le Musée d’Orsay à Paris. Il renferme de riches collections d’art roman, gothique, renaissance et baroque, une collection d’art moderne ainsi qu’un espace « photographie ». Nous avons pu parcourir l’ensemble des peintures murales monumentales autour desquelles le musée a été pensé et qui ont fait l’objet de notre itinéraire en Catalogne.
Le conservateur d’Art Roman, Jordi Camps nous a annoncé la préparation d’une grande exposition l’année prochaine (février à mai 2008) intitulée
« La Catalogne et la Méditerranée dans la plénitude de l’Art Roman (1120-1180) » en association avec les villes de Toulouse et de Pise.
« Le moment artistique qu’elle souhaite souligner, précise Jordi Camps, coïncide dans une large mesure avec l’époque du premier comte-roi Ramon Berenguer IV (1131-1162), dont le règne fut fondamental pour la configuration définitive de la Catalogne médiévale, avec l’union de la maison de Barcelone et du royaume d’Aragon et la conquête de Lleida et Tortosa sur les territoires d’Al-Andalus. Du point de vue culturel et artistique, ce processus se poursuivit sur le territoire défini par l´arc méditerranéen occidental, initiant ainsi la création d’un espace commun d’échange. Rappelons les liens dynastiques qui unissaient la maison de Barcelone et la Provence ; rappelons aussi que la culture occitane, avec les troubadours, rayonnait avec force et enfin qu’il existait des contacts commerciaux avec les ports du midi de la France et de la Toscane occidentale.
C’est dans cet espace commun de l’arc de la Méditerranée occidentale, marqué par le contexte culturel et artistique de l’ancienne romanisation, que se développe l’art catalan ; les points de contact et les analogies entre les centres catalans et ceux des régions de Toulouse et de Pise, entre autres, témoignent bien d’une évolution commune. Dans ce contexte, l’art catalan se situe pleinement au niveau de l’art international. Pendant cette époque, de nouvelles constructions sont initiées et des réformes de grande portée sont menées à bien dans les grands centres, qui possédaient déjà des édifices construits dans les siècles précédents, comme les monastères de Cuixà, Sant Pere de Rodes, Ripoll ou les cathédrales de Vic et de Gérone. Commence alors la création de cloîtres avec des images sculptées et les grandes façades décorées en relief, qui donnent lieu à des chefs-d’œuvre tels que le grand portail de Ripoll. Parallèlement les églises doivent se doter de mobilier d’autel et de statues qui constituent un autre apport de l’art roman catalan, avec des objets d’une très riche polychromie, comme les devants d’autel ». (Internet :
http://www.mnac.es)
Ce voyage était organisé par
« Tourisme de la Catalogne » à Paris ; Remerciements à Josefina Mariné et ses collaboratrices, Anna et Eva, pour leur gentillesse, leur professionnalisme et leur disponibilité. Tourisme de la Catalogne :
http://www.catalunyatourisme.com
La découverte de l’Art Roman en Catalogne était organisée conjointement par le Tour Operateur
« Via Nostra , Voyages Culturels » dont le siège est à Toulouse. La jeune créatrice du concept, Delphine Valls, propose à travers ses programmes aux destinations diverses (90 voyages culturels à travers 42 pays), la possibilité de voyager autrement guidé par curiosité et ouverture d’esprit. Elle était accompagnée d’un guide-conférencier (Notre Photo), Professeur d’Université à Toulouse, Marc Salvan-Guillotin, véritable et inépuisable source de savoir sur le sujet. Visitez leurs sites : Via Nostra :
http://www.vianostra.fr et Marc Salvan-Guillotin :
http://histoiresdart.neuf.fr
Transport : Iberia (http://www.iberia.com)
Restaurants : Restaurant Boira à Girone sur la Place de l’Indépendance ; Restaurant La Teuleria à Sant Joan Les Abbesses (http://www.lateuleria.com) ; Restaurant La Llebreta à Barruera (pour les produits du terroir pyrénéen) ; Hostal del Carme à Vilagrassa, une heureuse surprise pour un restaurant d’aire de service (http://www.hostaldelcarme.com) à Barcelone, la superbe salle panoramique du Restaurant du MNAC, Oleum (Notre Photo) et sur le port de Barcelone, une superbe adresse pour manger les spécialités « poisson » de la région : La Galvina (http://www.lagalvina-rte.com)
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